Article 24: quand la bourgeoisie tombe le masque


Lot de 2 Matraques télescopiques 50,5cm impact - POLICE MatraqueL’actuelle loi votée au parlement sur la “sécurité globale” limite la diffusion d’images des forces de l’ordre. La bourgeoisie se défait ainsi d’une parure un peu encombrante. Moment historique qui déchire cette classe. Cependant, ainsi, elle ne peut plus paraître la classe qui émancipe toute la société. Fin d’un illusoire universalisme, notre ennemi se montre, enfin, tel qu’il est.

Tout d’abord, la loi entérine un état de fait: qu’ils ou elles soient citoyens, citoyennes, et même journalistes, les difficultés étaient déjà grandes pour filmer les forces de l’ordre dans l’exercice de leur fonction: réprimer. Il y a deux sortes de lois: celles qui rendent possibles des pratiques (pensons à celle autorisant le divorce, qui a changé donc les rapports genrés au sein du mariage) et celles qui entérinent des pratiques. Nous sommes face à une loi du second type. Dans cette mesure, elle n’est qu’un instrument de plus dans les mains de la bourgeoisie dans le rapport de force avec le prolétariat. Elle accorde de plus grands moyens à ceux qui défendent l’Etat, instrument dans le rapport de force entre classes.

Ensuite, cette loi provoque une levée de bouclier dans les rangs de la bourgeoisie (une tribune a été signée par une trentaine de rédactions, allant du Canard jusqu’au Point): la liberté de la presse a été une des premières manifestations de la prise de pouvoir de la bourgeoisie au 19e siècle. Elle perd donc ainsi une partie de son ADN, ce qui la caractérisait était la liberté (celle de se vendre sur un marché, celle de s’informer, celle de voter, etc.). La bourgeoisie a-t-elle changé? Non. Elle doit seulement se défaire d’une partie de son identité pour pouvoir se maintenir.

Aux abois, elle se doit donc d’abandonner la “démocratie”, la liberté de la presse et d’informer. Le moment est historique en Europe. La bourgeoisie s’est imposée face aux gouvernements aristocrates dont l’ADN était la répression de la liberté d’informer et la limitation du droit de vote.

Que nous montre donc cette loi? Que les règles, le cadre dans lequel se déroule la lutte des classes, fixé par la classe dominante, change. Cependant, ce qui apparaît être une offensive de la classe dominante est en fait, pour elle, une concession sans précédent sur ce qui la caractérisait et lui avait permis de s’imposer. En se défaisant de son identité, de son universalisme et de son libéralisme, tout illusoires qu’ils puissent être, elle ôte la parure qu’elle portait fièrement, celle qui lui permettait de faire croire qu’elle portait avec elle les revendications d’un peuple fictif. Dans sa mue historique, la bourgeoisie rejoint progressivement son essence: celle d’une classe prise dans une lutte à mort avec une autre.

Quelle est donc cette essence? C’est la modalité selon laquelle elle se pose dans le rapport de force, comme Marx l’écrivait dans la Contribution à la critique de la philosophie du droit (1844):

“Ce n’est qu’au nom des droits généraux de la société qu’une classe particulière peut revendiquer la suprématie générale”

Et plus loin, de noter, ce qui n’est pas sans ironie dans la situation actuelle, la spécificité de la classe bourgeoise française:

“En France, toute classe du peuple est idéaliste politique, et elle a d’abord le sentiment d’être non pas une classe particulière mais la représentante des besoins généraux de la société.”

A présent, nous pouvons donc affirmer que la classe bourgeoise en France a renoncé à être idéaliste politique. Elle a renoncé, pour pouvoir se maintenir en position dominante dans le rapport de force entre classes, à se présenter comme représentante de toute la société. La farce avait assez duré. Pour une raison simple: seule la classe du “scandale général”, la classe des prolétaires, peut poursuivre le “mouvement dramatique” qui mène à l’émancipation de toute la société.