Notes de lecture: DIETRICH (Théo). — La pédagogie socialiste. Fondements et conception, trad, de


DIETRICH (Théo). — La pédagogie socialiste. Fondements et conception, trad, de

l’allemand. — Paris, François Maspero, 1973.

Contribution à la pédagogie inférée à partir de l’anthropologie de Marx (IA, l’homme totalement développé), mais aussi sur des indications éparses, comme 10e thèse du Manifeste (réunion de l’éducation et de la production), éducation polytechnique du tome 2 du Capital.

Wittig et Anweiler (Polytechnische Bildung)

Pour Dietrich, l’apport spécifique de Marx est cette interaction entre production et éducation

Dans la Critique du programme de Gotha la suppression du travail des enfants qualifié de réactionnaire, parce qu’il est bon de combiner « de bonne heure le travail productif avec l’instruction est un des moyens des plus puissants de transformation de la société actuelle ». Evidemment, on voit ici valeur positive accordée au travail, une valeur éducative. La question : est-il un moment nécessaire à arriver à cet autre travail, « l’activité émancipatrice » des Manuscrits de 18441 ? Problème d’une conception qui veut qu’il y a des étapes.

Si la conception de l’éducation proposée par Marx en 1850 (travail à l’usine comme centre et base de l’éducation, texte?) se situe en rupture avec « l’intellectualisme » de Herbart et Humboldt, Marx n’est pas si novateur si on le met en regard des théories de « l’école industrielle » du siècle des Lumières :

En effet, les Encyclopédistes réhabilitent les « arts mécaniques », ou bien les « philanthropes » comme Benjamin Franklin, préconisent former « l’homme total », polyvalent, avant même qu’Engels ne dénonce la division du travail. Il s’agit en fait d’une discussion sur l’intégration dans les programmes scolaires d’une partie pratique, avec des activités manuelles, ou si l’étude consiste en l’étude de la réalité livresque éthérée (intellectualisme). Donc une réaction à ce qu’était l’école au temps du paedaogus, où l’activité manuelle était reléguée en dehors, parce que c’était une distinction de classe. La question de l’intégration d’activités manuelles dans l’école est donc intimement liée à l’intégration d’une main-d’oeuvre, à sa formation, en vue d’être un agent de mise en valeur.

Ph Sextro et Pestalozzi (Industrieschulen).

Mais Marx opère une rupture dans la mesure où libéraux ou utopistes accordent une valeur utilitaire au travail productif (remédier au paupérisme par une éducation centrée sur la vie active), ou humanitaire (réhabiliter les métiers utiles). Non, pour Marx, l’éducation n’est pas constituante à l’égard du travail, mais constituée par lui (p.94). Une constante anthropologique du travail ? REF

Deux grandes figures pour Dietrich, isole deux grandes figures de l’histoire de la pédagogie marxiste. D’une part Blonskij, qui ne fait pas école, alors même qu’il est déclaré par Dietrich comme étant en conformité avec la théorie marxiste et d’autre part Makarenko, qui dénature l’école.

Dans L’école du Travail (1921), P.P. Blonskij s’inspire de Dewey : Il part du concept d’« éducation progressive » de Dewey ou de Decroly, il veut faire redécouvrir spontanément par l’enfant ce qu’ont été les grandes étapes de l’histoire technique de l’humanité, qui conduisent par un processus naturel à l’harmonie de la société sans classes.

Le problème est que Blonskij substitue une réforme pédagogique à une révolution politique (ce qui revient à un réformisme), mais aussi montre un manque de réalisme. Paul de Loye déclare au sujet des méthodes préconisées par Blonskij : « sont-elles des cheminements efficaces pour préparer les techniciens compétents et compétitifs dont a besoin une république socialiste, qui veut s’équiper d’une technologie avancée, capable de s’imposer dans la concurrence internationale ». Autrement dit, de bons capitalistes d’État.

Makarenko est le pédagogue du Kremlin à partir de 1923 (sous Staline). Sa conception de l’éducation consiste en l’affirmation qu’elles se divisent en études fondamentales et en l’apprentissage de l’abnégation de l’individu face à la collectivité. Ainsi, l’éducateur est conçu comme fonctionnaire de l’idéologie. Par ailleurs, Makarenko permet ainsi un rétablissement de la spécialisation en contradiction avec la base de la théorie marxienne. Pour Dietrich, cela a amené à la fin de l’école polytechnique en URSS.

Pour Paul de Loye, le problème est que Dietrich ne prend pas en compte les écrits de jeunesse de Marx. Enferme la question pédagogique dans le dilemme : ou bien le marxisme est évolutionniste/déterministe, ou bien l’école est, comme la révolution, imposée par en-haut, ce qui consiste en un léninisme.

1Pléiade, p. 260 ?